La mondaine et consultante en art Umang Hutheesing appelle passionnément Ahmedabad la splendeur de l’Orient construite par des marchands. Umang est l’héritier d’une famille mercantile historique d’Ahmedabad qui a activement financé l’Inde à différentes étapes de son histoire. Sa collection privée de costumes et d’accessoires de l’Inde princière est la plus grande collection de ce type au monde.
De tout temps, les gens ont aimé voyager et découvrir de nouvelles terres, explorer de nouvelles villes et faire l’expérience de cultures différentes. On les a appelés explorateurs, voyageurs et maintenant touristes ! Les noms changent mais l’esprit d’aventure reste le même. Beaucoup de ces voyageurs ont documenté leurs expériences dans des journaux, des peintures, des photographies, des films et maintenant les médias sociaux, où ils partagent leurs expériences avec leurs amis et leurs concitoyens en temps réel. Ces carnets de voyage sont devenus une source importante de documents historiques, car il s’agit de récits authentiques de première main de personnes qui, en tant qu’historiens et voyageurs, ont vu et vécu plusieurs endroits et peuvent donc les comparer et les évaluer par rapport aux normes de l’époque.
“Regardez ces magnifiques balcons sur le Grand Canal avec les gondoles romantiques, c’est Venise ! Et cette magnifique villa sur cette gracieuse place, c’est Florence !” Ces deux villes historiques regorgent de beaux objets d’art et d’une architecture raffinée, leurs places sont ornées de statues et de fontaines et il y a de la sophistication dans ses habitants et une culture vivante dans chaque rue. Après tout, ces deux villes ont été construites par leurs puissants marchands qui faisaient le commerce de bijoux, de textiles et de produits artisanaux. Florence et Venise sont des villes enchanteresses et des millions de touristes du monde entier y viennent chaque année pour s’imprégner de leur magie.
Pourtant, il existe une troisième ville, inconnue des nouvelles générations, d’une beauté et d’une puissance historiques équivalentes. Une ville décrite par le célèbre voyageur et joaillier français Tavallier il y a quelques siècles comme “la plus belle ville du monde”, la comparant à Florence et Venise. Il dit qu’il n’y a pas de grand palais du roi dans cette ville, mais que chaque maison est exquise avec ses façades en bois ressemblant à de la dentelle. Il y a de nombreuses rues avec de grandes portes et des places pleines d’activité et des pagodes délicatement sculptées pour nourrir les oiseaux au milieu. Les gens sont intelligents et fiers de leur héritage. “Une belle ville construite par ses citoyens, mécènes de l’art, de l’architecture et de la culture, cette ville de Marchands ! …La ville d’Ahmedabad.”
La métropole d’Ahmedabad est la porte d’entrée du Gujarat. Elle était auparavant connue sous le nom d’Ashaval, puis de Karnavati. L’Ahmedabad d’aujourd’hui a été construit par le sultan Ahmed Shah en 1411 sur les rives de la rivière Sabarmati ; car c’est ici, selon la légende, que le sultan a vu un lièvre chasser les chiens !
William Finch et Nicholas Withington, qui ont séjourné à Ahmedabad en 1611, ont “trouvé de la marqueterie fine, du brocart d’or et d’argent, des velours et des taffetas”. Le voyageur allemand Mandesloe l’a décrite en 1638 comme “le siège des fabricants, la plus grande ville de l’Inde, rien d’inférieur à Venise, un emporium commercial inégalé où l’on peut se procurer des marchandises de n’importe quelle partie de l’Asie et où l’on peut échanger des billets étrangers”. Sir Thomas Roe écrit ainsi au roi Jacques d’Angleterre, sous le règne de l’empereur moghol Jahangir : “Ahmedabad est une ville pieuse, aussi grande que Londres.”
Dans ses Mémoires orientaux publiés en 1813, James Forbes décrit la ville d’Ahmedabad en ces termes : “Jusqu’à cette visite à Ahmedabad, je n’avais aucune idée de l’étendue de la magnificence orientale, les palais et les chambres splendides décrits dans les divertissements des Mille et Une Nuits ne semblent plus surfaits ou fabuleux.” Lock Wood de Forest, célèbre artiste et décorateur américain, a été tellement impressionné par “le goût exquis et la beauté des Havelis d’Ahmedabad que lui et Louis Tiffany, de Tiffany & Co, aux États-Unis, ont établi un partenariat avec la famille Hutheesing en 1881. Ensemble, ils ont créé les merveilles architecturales et intérieures de la splendeur d’Ahmedabad, qui ont remporté neuf médailles d’or internationales lors des expositions universelles de Paris et de Londres. Ils ont ensuite réalisé l’intérieur de la Maison Blanche, du palais de Kensington et de plusieurs autres bâtiments emblématiques en Amérique et en Europe, à une époque où le monde imitait l’Europe impériale en matière d’art et de design.
La ville moderne d’Ahmedabad n’a pas été fondée par les puissances impériales, mais par sa communauté mercantile, les “Mahajans” ! La contribution des Mahajans à la construction de notre nation est exemplaire. Leur culture d’entreprise a apporté une richesse et une prospérité considérables grâce au commerce et à l’industrie. Ahmedabad est devenu le Manchester de l’Est avec un nombre maximum d’usines textiles. Cette culture de l’entreprise et de l’esprit d’entreprise perdure jusqu’à ce jour. Les Mahajans étaient réputés pour leur culture de la philanthropie et du mécénat. Ils ont construit des instituts éducatifs et culturels, des temples, des musées, des hôpitaux et plusieurs autres fonds et dotations pour le bien-être de la communauté. Ils ont invité les principaux architectes de l’époque, comme Le Corbusier, Louis Khan et Claude Bathey, à construire des institutions. La culture unique d’entreprise et de philanthropie d’Ahmedabad en a fait l’épicentre du mouvement Swaraj du Mahatma Gandhi. C’est ici que Gandhi ji a établi l’ashram de Sabarmati, d’où il a orchestré le mouvement pour la liberté de l’Inde, le reste appartient à l’histoire.
La richesse légendaire d’Ahmedabad a donné naissance à de magnifiques Haveli, d’une grande splendeur artistique et culturelle, qui montrent que l’Inde est une ancienne tradition vivante et vibrante dans ses maisons, et pas nécessairement fossilisée dans un musée. C’est un pays de couleurs, chacune ayant sa propre signification et iconographie, un pays du “plus” plutôt que du “moins” ; une union sans faille du classique et du contemporain !